La septième audience publique des présumés coupables dans l’affaire des massacres de Gatumba a pris fin hier 14 décembre 2011, après que le siège ait écouté les 3 derniers prévenus dans cette affaire. La pièce maîtresse du procès a porté mardi sur l’audition d’un officier de l’armée burundaise, le lieutenant François Niyonkuru, et d’un civil, Innocent ndikuriyo, alias Nzarabu. Ce dernier s’est fait passé pour un innocent et a accusé les forces de sécurité burundaise appartenant au service national des renseignements (Snr) et à la police nationale, en l’occurrence un général et un commandant qui l’ont arrêté, d’être eux, les responsables.
Le ministère public a requis la perpétuité (prison à vie) contre 10 prévenus et 40 ans de prison ferme contre 11 autres qui étaient accusés de « complicité de meurtre » dans ce même dossier du massacre de Gatumba. Le procès de cette affaire a été mise en délibéré et la date du verdict de la cour n’a pas été immédiatement fixée. En ce moment, les 14 avocats de la défense protestent contre un réquisitoire prononcé sans la comparution des officiers de la police cités par leurs clients comme « planificateurs » présumés du massacre de Gatumba.
Réactions recueillies à chaud par AGnews dans la rue de Bujumbura puisque le procès était publique …
M. Karim Nzeyimana, habitant à Bujumbura : “C’est troublant de voir que des criminels supposés aient eu autant d’avocats et surtout pas des moindre dans un procès comme çà … En plus, le voleur accuse le policier du vol et la défense veut convoquer le policier pour vol … Et certains médias disent que c’est le policier le voleur … C’est tout à fait dingue ! Grosso modo c’est comme ci on demandait au président Bush de venir s’expliquer sur le – 9 septembre – à la demande des avocats de Ben Laden si il existait encore… “.
Un autre badaud de Bujumbura qui a voulu requérir l’anonymat : ” Ce qui est bizarre c’est de voir que certains des accusés avaient la même défense argumentaire. Ils accusaient tous la police et les services de renseignement du Burundi qui les ont arrêtés. Malheureusement pour eux, ils avançaient dans le même sens qu’un agent franco-burundais de la DGSE (service de renseignement français) connu sur la place publique burundaise et qui a sorti un rapport reprenant mot pour mot leurs dires … De plus, fait encore bizarre, c’est le correspondant de l’AFP et de RFI (organes de communication international français) un burundais notoire. Ici, avant même la fin du procès, il s’est empressé de publier sur tous les téléscripteurs du monde que c’était la police burundaise (soit l’Etat du Burundi) qui était responsable des massacres de Gatumba … Même en anglais ! “.
Un autre badaud juste à côté reprend un peu remonté. AGnews lui demande son nom. Il refuse. Que voulez vous dire Monsieur :”J’abonde dans le même sens que ce monsieur … Cet agent franco-burundais de la DGSE française est très connu ici au Burundi. Il a fomenté une rébellion à l’extérieur du pays avec l’ADC Ikibiri (opposition burundaise regroupant des partis politiques -non fair-play- qui n’ont pas reconnu le verdict des élections en 2010 au Burundi)… Apparemment à entendre tout çà, en effet, au mois de juillet et août cet agent franco-burundais a crée une rébellion. Jusque là çà passe encore ! Mais cette dernière a commencé à agir par des actes terroristes car ils n’ont pas le soutien populaire (*). Au mois de septembre, il fallait frappé fort pour prouver son existence en vue de contraindre le gouvernement burundais à négocier avec eux – l’ADC Ikibiri – ! Le massacre de Gatumba arrive … Ils ont certainement tout simplement foiré. Comme la France est impliquée … L’argumentaire des accusés et les sous de la défense doivent provenir de ce côté là. Car il est troublant que la semaine dernière France 24 (chaîne publique internationale française) ait voulu salir gratuitement à l’image du pouvoir en place au Burundi. Bizarre aussi l’intervention de l’ambassade de France en vue de soutenir financièrement soudainement la nouvelle Commission nationale indépendante des droits de l’homme (CNIDH) … Si j’étais S.E. le Président Nkurunziza j’éviterai de me rendre à N’Djamena cette semaine (Tchad, territoire français en Afrique par excellence) . Ce procès de Gatumba précise qu’il a quelque chose de trouble dans le fonctionnement français ! Le Burundi devrait saisir le nouveau procureur de la CPI -pour tentative de création d’une rébellion – avec comme cas aggravant -le massacre de Gatumba de septembre-. En quelque sorte, le gouvernement du Burundi doit traduire la France au CPI …”.
Un dernier badaud à côté a pris le micro, un peu saisie par ce qu’il venait d’entendre : “Si c’est le pouvoir CNDD/FDD qui est responsable, il faut que ces policiers soient condamnés.”
Cette ambiance électrique à Bujumbura s’inscrit dans un contexte mondial de récession en occident et géopolitique -chaud- dans la région des Grands Lacs africains, avec le verdict des élections en RDC qui vient d’être remis en cause par un groupe qui apparemment avait bien prévu le coup … Les choses à venir n’en étonneront pas plus d’un ! Comme le dit un des intervenants anonyme, les voyages d’un chef d’Etat en période aussi trouble doit être véritablement pensé.
(*) Voir Grand reportage sur le Burundi en 2011.
DAM, NY, AGnews, le 15 décembre 2011.