L’opposition burundaise pointée du doigt par les Nations unies dans un rapport sur la République démocratique du Congo
Un rapport des experts des Nations unies sur la République démocratique du Congo (RDC) incrimine l’opposition burundaise de travailler de mèche avec les groupes armés installés dans la région du Sud-Kivu pour déstabiliser la région et exploiter illégalement les ressources minières de la RDC.
Selon le rapport qu’on peut consulter sur le site du Conseil de sécurité des nations unies en suivant ce lien http://www.un.org/sc/committees/153…indique que les responsables politiques de l’Alliance démocratique pour le Changement ADC-Ikibiri accordent “un appui politique, matériel et financier” à un groupe armé que les experts des Nations unies ont préféré appeler les Forces Nationales de Libération dont les combattants sont basés à l’Est de la RDC.
En attendant que le Gouvernement du Burundi se prononce sur ce rapport, vous pouvez lire un extrait du rapport de plus de 500 pages qui concerne certains responsables de l’opposition burundaise tout en sachant que les textes originaux en intégralité en français comme en anglais se trouvent sur le site internet du conseil de sécurité des Nations unies. Le titre du rapport est :
Final report of the Group of Experts on the DRC submitted in accordance with paragraph 5 of Security Council resolution 1952 (2010)
E. Forces nationales de libération
136. Le Groupe d’experts a continué d’enquêter sur les combattants des Forces nationales de libération (FNL)46 actifs dans le Sud-Kivu. Conformément à son mandat relatif à l’appui financier, matériel et politique aux groupes armés en République démocratique du Congo, le Groupe d’experts s’est intéressé essentiellement aux individus qui fournissent cet appui aux FNL et à la participation du mouvement au trafic d’armes et à l’exploitation des ressources naturelles.
137. Les dirigeants militaires des FNL restent basés dans la plaine de la Ruzizi, près des villages d’Ondes et Runingo, au nord de la ville de Kiliba. Les FNL empruntent cinq points de passage frontaliers non contrôlés pour se déplacer facilement dans la forêt de Rukoko, leur ancien bastion, qui s’étend des deux côtés de la Ruzizi, laquelle sépare la République démocratique du Congo du Burundi. Le « général » Antoine « Shuti » Baranyanka est le commandant en chef des FNL47. Parmi les principaux officiers d’état-major, on citera le « lieutenant-colonel » Aloys Nzamapema, chef des opérations, et le « major » Logatien Negamiye, chargé du renseignement. Si les combattants actuels affirment être au nombre de 200 autour du siège de Baranyanka, près de Kiliba, ils sont plutôt une cinquantaine d’après des officiers du renseignement burundais. Le reste des éléments burundais présents en République démocratique du Congo se trouvent dans le territoire de Fizi, entre le moyen plateau d’Uvira et la presqu’île d’Ubwari. D’après les estimations du Groupe d’experts, 300 à 400 combattants s’y trouvent en permanence. Baranyanka et Nzamapema se rendent fréquemment de Kiliba à Fizi afin de maintenir leur contrôle sur les combattants.
46 Les dirigeants de l’opposition burundais continuent de discuter du nom à donner à leurs combattants. Tant qu’aucune décision n’aura été prise sur ce point, le Groupe d’experts continuera de se référer à ce groupe armé étranger sous l’appellation « Forces nationales de libération ».
Dirigeants politiques
Alexis Sinduhije
138. Les sources consultées par le Groupe d’experts s’accordent à dire qu’Alexis Sinduhije, Président du Mouvement pour la solidarité et la démocratie (MSD), est un partisan particulièrement fervent des combattants des FNL et de la rébellion armée au Burundi. Quatre officiers des FNL de rang intermédiaire ont déclaré que les combattants des forces dans le Sud-Kivu considéraient Sinduhije comme l’un des principaux dirigeants de leur mouvement. Selon un autre combattant des FNL, les relations entre Sinduhije et Baranyanka se sont dégradées un moment en juillet, le second accusant le premier d’avoir usurpé son rôle en se déclarant commandant suprême du mouvement. Des combattants des FNL ont déclaré que Sinduhije avait été chargé de convaincre les gouvernements régionaux et internationaux que les exactions et les actes de corruption commis par les autorités burundaises justifiaient une rébellion armée.
139. D’après des sources diplomatiques et de la société civile, Sinduhije s’était rendu au cours des derniers mois en Ouganda, en France, en Italie, en Afrique du Sud, en Turquie, au Soudan du Sud et au Kenya, afin de rencontrer des personnalités officielles et des investisseurs. Selon des collaborateurs du mouvement, Sinduhije a également cherché à entrer en contact avec les partis d’opposition rwandais. D’après les services de renseignement burundais et des membres des FNL, Sinduhije a réussi, grâce à tous ces contacts, à fournir un appui financier aux rebelles basés dans le Sud-Kivu. Les tentatives répétées du Groupe d’experts d’organiser une conversation téléphonique avec lui pour discuter de ces questions sont restées vaines.
140. Début septembre, la police et les services de renseignement burundais ont arrêté trois partisans des FNL placés sous les ordres d’un ancien cadre politique du MSD dénommé Onesphore dans la ville portuaire de Rumonge, alors qu’ils auraient été en train d’organiser l’arrivée d’une unité de combattants venant de la République démocratique du Congo. La police burundaise a présenté au Groupe d’experts un inventaire des marchandises qu’elle aurait trouvées en la possession d’Onesphore ; il y avait plus de 400 articles (voir annexe 25). Bien que des combattants actuels aient confirmé qu’Onesphore collaborait avec les FNL dans le Sud-Kivu, celui-ci a nié, affirmant qu’il avait l’intention de vendre les articles. Après son arrestation, la police burundaise a indiqué que Sinduhije avait appelé un partisan des FNL depuis un numéro kényan. Le Groupe d’experts s’est procuré des enregistrements audio qui montrent que l’auteur de l’appel a donné l’ordre au partisan en question de fuir et a proposé d’envoyer 500 000 francs burundais48 pour aider à faire libérer Onesphore (voir annexe 26). Des sources proches de Sinduhije ont affirmé avoir reconnu sa voix.
48 Selon le taux de change officiel en vigueur au moment de l’établissement du présent rapport, 500 000 francs burundais équivalent à 405 dollars des États-Unis environ.
Encadré 1 Partisans des FNL Agathon Rwasa Le Président des FNL Agathon Rwasa a consolidé une alliance avec les Maï Maï Yakutumba début 2011 (voir par. 168 à 170). Depuis, il s’est rendu en République-Unie de Tanzanie, au Kenya, en Zambie et en Afrique du Sud, ainsi que dans les territoires de Fizi et d’Uvira. Le Groupe d’experts a interrogé des témoins qui affirment l’avoir vu à Kigoma, en République-Unie de Tanzanie, tandis qu’il convoyait des articles destinés aux combattants des FNL dans le territoire de Fizi. Les services de renseignement burundais et des sources proches des partis d’opposition ont dit que Rwasa avait passé beaucoup de temps à Dar es-Salaama. Selon ces mêmes sources, Rwasa a établi à nouveau des relations commerciales concernant la vente d’or en provenance de la République démocratique du Congo (voir par. 143). Pendant ses déplacements, Rwasa reste en contact étroit avec Baranyanka, qui dirige ses troupes présentes en République démocratique du Congo.
Léonard Nyangoma
Selon des sources diplomatiques, Léonard Nyangoma, Président du Conseil national pour la défense de la démocratie (CNDD), a mené une campagne de recrutement au sein des populations de réfugiés burundais en République-Unie de Tanzanie pour les enrôler dans les FNL sur le territoire de Fizi, au Sud-Kivu (voir par. 147 et 148). Des combattants des FNL à Kiliba ont déclaré avoir participé à des ramassages d’armes dans les quartiers burundais, où des partisans leur ont dit que les armes avaient été fournies par Nyangoma.
Pascaline Kampayano Selon des sources de renseignement burundais et des combattants des FNL, la Présidente du parti Union pour la paix et le développement (UPD), Pascaline Kampayano, fournirait de l’argent à Rwasa, Sinduhije et Baranyanka. Selon ces mêmes sources, elle aurait réactivé ses contacts politiques et militaires à Kinshasa, où elle a vécu en exil de nombreuses années. Des combattants des FNL ont dit au Groupe d’experts qu’elle avait organisé des envois de matériel militaire, y compris d’armes et de munitions, par l’intermédiaire d’officiers des FARDC. Ils ont ajouté qu’elle s’était rendue dans leur camp de la plaine de la Ruzizi en octobre 2010. L’un d’eux l’a même vue promettre des marchandises à Baranyanka, en faisant jouer ses contacts avec les FARDC. Deux semaines plus tard, un camion congolais est arrivé, apportant plus de 50 nouveaux uniformes.
Pancras Cimpaye D’après des combattants des FNL et d’autres sources proches d’eux, le porte-parole du Front pour la démocratie au Burundi (FRODEBU), Pancras Cimpaye, sollicite l’appui de l’opinion internationale et cherche un soutien financier pour les FNL. Interrogé en mars 2011, Cimpaye a déclaré qu’il essayait d’obtenir un appui régional et international pour forcer le Gouvernement burundais à parler avec l’opposition, évoquant la menace que représentait la rébellion croissante des FNL. Dans une lettre ouverte adressée au Président Nkurunziza le 22 juin 2011, Cimpaye a déclaré qu’on « entendait au loin l’écho d’une rébellion » (voir annexe 27).
Des représentants du FRODEBU à Bujumbura ont informé le Groupe d’experts que le parti n’avait pas autorisé les activités de Cimpaye. Ce dernier, résidant en Belgique, le Groupe d’experts a demandé officiellement aux autorités belges de confirmer ses entrées et sorties du territoire. Au moment de l’établissement du présent rapport, il n’avait pas encore reçu de réponse. Il a également tenté d’entrer en contact avec Cimpaye par courriel et par téléphone à la fin de son mandat, en vain.
Rwasa a vécu de nombreuses années à Dar es-Salaam avant de diriger la rébellion des FNL ; il s’y trouvait également tout au long des négociations prolongées avec le Gouvernement burundais de 2006 à 2008.
141. Des officiers des FNL interrogés près de Kiliba début septembre ont affirmé ne plus se battre uniquement pour Rwasa mais pour l’ensemble de l’Alliance démocratique pour le changement-Ikibiri (ADC-Ikibiri), citant expressément Sinduhije, Kampayano, Cimpaye et Nyangoma comme étant leurs dirigeants politiques. Ils ont ajouté avoir renoncé à leurs préoccupations ethniques, se disant prêts à travailler avec des dirigeants tutsis tels que Sinduhije. Le 27 août, Léonce Ngendakumana, porte-parole de l’ADC, a déclaré que si le Gouvernement burundais rejetait les négociations avec l’opposition politique, il risquait d’être « chassé par la force des armes ».
142. D’après des sources proches de l’opposition, à une réunion de l’ADC tenue à Dar es-Salaam en août, tous les dirigeants politiques, y compris Kampayano et Rwasa49, sont tombés d’accord pour que Sinduhije prenne la direction générale de leur rébellion naissante, qui reposerait sur les troupes des FNL au Sud-Kivu.
Exploitation des ressources naturelles 143. Le commerce des ressources naturelles du Sud-Kivu constitue une source de revenus importante pour les FNL. Selon les services de renseignement burundais et des sources des FNL, Rwasa travaille en étroite collaboration avec Thomas Hamenyimana, un Burundais naturalisé Tanzanien qui est propriétaire de l’hôtel Nyavayamo à Dar es-Salaam (voir annexe 28). La police burundaise a confirmé qu’Hamenyimana collaborait avec l’officier de liaison des FNL Datus Hishirimimana, qui passait souvent par Kigoma en allant à Talama chercher de l’or pour le rapporter et le vendre à Dar es-Salaam. Selon les membres de la population locale questionnés durant la visite du Groupe d’experts à Kigoma, des collaborateurs des FNL traversent souvent la ville d’Ujiji, au sud de Kigoma. Des sources diplomatiques et de renseignement régionales ont affirmé que certains
144. Des combattants des FNL et des membres du renseignement burundais ont révélé que « des Blancs » étaient venus voir les rebelles et leur avaient promis des armes en échange de minerais. Selon une source, Kampayano les avait fait venir de Kinshasa, mais selon une autre, ils habitaient à Nairobi et avaient été en relation avec des associés de Sinduhije.
145. Des combattants des FNL et des officiers du renseignement burundais ont indiqué que les FNL faisaient du commerce de bois de feuillus provenant essentiellement du moyen plateau d’Uvira et de la forêt de Nganja, dans le territoire de Fizi. Un ancien rebelle interrogé par le Groupe d’experts à Uvira a indiqué que le bois était souvent transporté sur le lac Tanganyika jusqu’au port de Rumonge, sur les mêmes bateaux que ceux qui apportaient de nouvelles recrues et des marchandises en République démocratique du Congo. Les planches de bois étaient vendues à Bujumbura et à Dar es-Salaam après avoir transité par les ports de Kigoma et Rumonge respectivement.
146. Les autorités tanzaniennes ont nié que du bois de construction était importé de la République démocratique du Congo à des fins de réexportation. Des négociants consultés dans des dépôts de bois de construction à Dar es-Salaam ont néanmoins confirmé la bonne qualité du bois congolais, désigné en République-Unie de Tanzanie par le terme mwinga. Ils ont précisé que la majorité du bois congolais qui entrait au Burundi était réexporté vers les Émirats arabes unis. Au moment de l’établissement du présent rapport, les demandes de statistiques adressées aux autorités émiriennes sur les importations de bois de République-Unie de Tanzanie sont restées lettre morte.
Recrutement
147. Selon les estimations du Groupe d’experts, les FNL au Sud-Kivu ont recruté au moins 200 anciens membres des services de sécurité burundais, essentiellement parmi d’anciens membres des FNL, une faction du CNDD dirigée par Léonard Nyangoma et d’anciens combattants mécontents du CNDD-Forces de défense de la démocratie. En outre, les services de renseignement burundais et des sources diplomatiques ont révélé que les FNL avaient enrôlé plus de 300 réfugiés présents dans des camps burundais en République-Unie de Tanzanie51. Des sources proches des FNL et les services de renseignement burundais ont signalé l’existence de camps d’entraînement pour les combattants recrutés en République-Unie de Tanzanie, avant qu’ils ne rejoignent la République démocratique du Congo.
148. D’anciens combattants des FDLR ont affirmé que les FNL avaient mobilisé de nouveau certains déserteurs au Sud-Kivu, au Nord-Katanga et dans les environs de Kigoma, en République-Unie de Tanzanie. Le commandant Chombe, combattant des FDLR démobilisé, a affirmé au Groupe d’experts avoir envoyé 35 anciens combattants rwandais comme mercenaires pour le compte des FNL.
50 Le Groupe d’experts n’a pu établir la preuve que les autorités soutenaient officiellement Rwasa et les FNL d’une manière ou d’une autre. 51 Le Groupe a demandé officiellement à se rendre dans ces camps de réfugiés et à rencontrer la population, mais à la date du présent rapport, il n’a pas reçu de réponse.
Alliances avec d’autres groupes armés
149. Les principaux alliés des FNL au Sud-Kivu sont les Maï Maï Yakutumba, avec lesquels elles partagent leurs stocks d’armes (voir par. 168 et 169). Les FNL opèrent également avec d’autres groupes armés de petite taille dans le Sud-Kivu, notamment avec ceux menés par les colonels Fujo, Nyerere et Baleke (voir par. 170). Un ancien combattant des FNL a déclaré qu’après avoir traversé le lac Tanganyika, il avait été envoyé directement dans un camp Maï Maï de Fujo. Des combattants des FNL ont dit qu’ils avaient conclu une alliance avec un groupe de jeunes du peuple Fulero52 en armes près de Mwaba et ont désigné des Maï Maï congolais démobilisés qui ont rejoint leurs rangs et étaient auparavant sous les ordres de l’actuel commandant de la 8e région militaire, le colonel Baudoin Nakabaka53.
150. Le Groupe d’experts a été informé par des officiers des FARDC et des responsables du renseignement congolais que l’objectif des FNL de former une alliance avec les FDLR54 ne s’était pas concrétisé car ces derniers procédaient au redéploiement de leur bataillon le plus au sud en dehors du territoire de Fizi, où les troupes de Rwasa se sont rassemblées pour garantir leur accès au lac Tanganyika (voir par. 105 et 106).
Déplacements sur le lac 151. Les recherches conduites par le Groupe d’experts indiquent que Rumonge est une plaque tournante et un centre logistique important pour les activités des FNL sur le lac Tanganyika. Selon des sources du renseignement burundais, les FNL utilisent aussi des ports plus petits, comme Karonda, Kayamba, Kizuka et Kagongo, ainsi que les forêts denses de palmiers de Gisenga et Kangunga le long de la frontière méridionale du Burundi avec la République-Unie de Tanzanie. Des combattants actuels des FNL, ainsi que des anciens, ont indiqué que ces régions servaient de points de transit pour les nouvelles recrues qui entraient en République démocratique du Congo et de points d’arrivée pour les commandos qui menaient des opérations au Burundi (voir par. 140). Lors de la visite du Groupe d’experts dans le port de Mboko, dans le Sud-Kivu, des représentants des autorités locales et des pêcheurs ont confirmé avoir assisté à l’arrivée, en février, de trois bateaux transportant plus de 70 combattants burundais, qui ont rejoint des combattants Maï Maï Yakutumba dirigés par le colonel Bwasakala dans le village de Bikoboko avant de poursuivre leur route vers le sud en direction de Talama. Autres formes de soutien et contributions financières
152. Des combattants des FNL affirment que dans la plaine de la Ruzizi, ils bénéficient du soutien d’hommes d’affaires basés à Uvira, parmi lesquels Jean Nyabyenda, qui a été arrêté par la police congolaise en août. Des anciens combattants ont révélé que Nyabyenda recrutait des rebelles et leur fournissait de la nourriture. Des partisans des FNL ont cherché à obtenir un soutien de sources privées et publiques en Ouganda. Durant une réunion avec le Groupe d’experts à Bruxelles début mars, Cimpaye a fait part de son intention de chercher à obtenir le 52 Le principale groupe ethnique dans la plaine d’Uvira au Sud-Kivu. 53 Les premiers déplacements de Rwasa depuis le Burundi en 2010 se sont faits avec le soutien de Nakabaka ; voir S/2010/596, par. 114. Voir aussi S/2009/603, par. 25 à 27, 29 à 31, 33, 39, 70, 73, 80, 150 et 159, et annexes 14, 50 et 51, et S/2010/596, par. 218, 230 et 294. 54 S/2010/596, par. 114, et S/2011/394, par. 39. soutien du Gouvernement ougandais afin de tirer parti de la dégradation présumées des relations entre Kampala et Bujumbura. Selon de multiples sources proches des rebelles, à la suite de courtes visites de Sinduhije, Nyangoma, Sinduhije et Cimpaye se sont rendus en délégation à Kampala afin de rencontrer de hauts fonctionnaires et des hommes d’affaires importants. Cela étant, le Groupe d’experts n’a jusqu’à présent trouvé aucune preuve du soutien du Gouvernement ougandais aux FNL. 153. Selon la société civile et les services de renseignement burundais, les FNL reçoivent aussi des contributions, volontaires et obligatoires d’entreprises basées à Bujumbura. Plusieurs transferts d’argent ont été effectués en faveur des partisans des FNL début 2011, par l’intermédiaire d’agences Western Union à Bujumbura, mais un combattant des FNL a dit au Groupe d’experts que cette pratique n’avait plus cours et que désormais, des rencontres étaient organisées avec les partisans à Bujumbura, Uvira et Bukavu. Soutien venant des services de sécurité de l’État
154. De nombreux combattants et partisans des FNL ont déclaré que les Forces bénéficiaient du soutien des services de sécurité burundais, et essentiellement de l’armée (Force de défense nationale), de la police (Police nationale du Burundi) et des services de renseignement (Service national du renseignement). Deux mille cent combattants des FNL ont rejoint l’armée et la police en 2009. Si on ignore combien il en reste précisément, les combattants actuels affirment que nombre d’entre eux ont reçu l’ordre de maintenir leurs positions officielles pour fournir des informations et des marchandises aux FNL.
155. Les mêmes sources ont dit au Groupe d’experts que les FNL bénéficiaient de leur coopération avec les FARDC, notamment avec des officiers locaux basés à Uvira qui avaient collaboré avec le groupe quand ils étaient encore des combattants maï maï. Elles ont ajouté que le colonel Nakabaka, commandant adjoint de la 8e région militaire, fournissait à Baranyanka des informations sur les opérations qui étaient sur le point d’être menées contre les FNL.
Approvisionnement en armes
156. Les services de renseignement burundais et des partisans des FNL ont confirmé que des dirigeants politiques des FNL avaient tenté d’obtenir des armes au Soudan du Sud. Selon certaines sources, des livraisons d’armes clandestines ont ensuite été organisées, mais le Groupe d’experts n’a pu en obtenir la confirmation.
157. Les caches d’armes au Burundi créées avant l’intégration des FNL dans les forces de sécurité burundaises sont également une importante source d’approvisionnement pour le groupe. Les combattants des FNL viennent souvent de la République démocratique du Congo pour récupérer ces stocks. Des combattants des FNL ont révélé qu’ils avaient découvert dans le village d’Ondes, dans le Sud-Kivu, une cache contenant plus de 400 armes au total, y compris des lance-roquettes RPG, des mitrailleuses non identifiées et des fusils d’assaut AK-47. Un partisan des FNL a parlé au Groupe d’experts d’une opération qui avait été conduite en juin 2011 pour retrouver près de 5 000 cartouches pour fusils AK-47 de trafiquants d’or non identifiés dans le quartier Essence de Bukavu.
158. Les services de renseignement burundais et des sources diplomatiques ont indiqué que les FNL au Sud-Kivu s’étaient procuré de nombreuses armes de sources
S/2011/738 non identifiées en République-Unie de Tanzanie. Deux anciens combattants des FNL ont révélé que le 15 mai 2011, ils avaient vu Nzamapema arriver avec deux canoës remplis d’armes à Moba, au sud de Kalemie, dans la province du Nord-Katanga. Un certain Shahib, Tanzanien arabe basé à Rukwa, dans le district de Subawanga, qui collaborait depuis longtemps avec Rwasa, selon des sources de renseignement congolaises, aurait expédié les armes le 15 mai.
IV. Les groupes armés nationaux
159. Les groupes armés congolais se sont préparés à l’éventuelle instabilité que pourrait provoquer une contestation postélectorale. Ceux qui sont déjà intégrés dans les FARDC, notamment la PARECO, le CNDP et les Forces républicaines fédéralistes (FRF), ont cherché à consolider leur emprise sur des postes de commandement décisifs et des territoires, dans l’espoir d’apporter le plus grand soutien possible à la campagne de leurs propres candidats et à celle du Président Kabila. Cela a galvanisé le soutien aux groupes armés non intégrés, qui restent profondément en faveur des candidats de l’opposition dans l’espoir d’inverser les concessions faites en particulier au CNDP et aux FRF.
A. Maï Maï Yakutumba (Forces armées alléluia)
160. Les Maï Maï Yakutumba (Forces armées alléluia) sont un groupe armé congolais à majorité bembe basé dans l’extrême sud du territoire de Fizi (Sud-Kivu). Le mouvement est dirigé par le « général » William Amuri, alias « Yakutumba », qui a refusé de participer au processus de brassage en 2007, en alléguant du début des rébellions des FRF et du CNDP, qui venaient juste de commencer dans le Sud et le Nord-Kivu.
161. Selon des ex-combattants, l’effectif total des Maï Maï Yakutumba est estimé entre 300 et 400 hommes, mais les rebelles affirment avoir des milliers d’autres partisans en civil dans l’ensemble du territoire de Fizi. Le commandant en second d’Amuri est le « colonel » Abwe Mapigano. Des officiers supérieurs des FARDC dans le territoire de Fizi ont déclaré que les Maï Maï possédaient trois mitrailleuses de 12,7 mm montées sur des bateaux en bois motorisés, ce qui leur conférerait une puissance inégalée sur le lac Tanganyika (voir annexe 30).
162. Pour de nombreux membres de l’ethnie bembe, les Maï Maï Yakutumba représentent la longue tradition de résistance des Bembe à ce qu’ils appellent les envahisseurs « étrangers », parmi lesquels ils rangent actuellement les Banyamulenge des FRF ainsi que les rwandophones du CNDP et les ex-officiers supérieurs de la PARECO intégrés dans les FARDC. Après qu’un accord de paix a été conclu par le Gouvernement avec les FRF en janvier 2011 (voir par. 284 à 291), les Maï Maï Yakutumba ont présenté, le 5 février, leur propre liste de revendications, dénonçant ce qu’ils perçoivent comme une capitulation du Gouvernement face aux intérêts « étrangers ». Amuri a régulièrement dénoncé Kabila pour le lâchage du pays au profit du Rwanda (voir annexe 31).
163. Le 22 août, les forces d’intervention rapide de la 42e brigade des FARDC ont lancé une attaque surprise à Talama. Les FARDC, qui affirment avoir tué plus de 20 combattants, ont interrompu leur poursuite à Yungu, au sud de la presqu’île.
Bujumbura, 20 janvier 2012(PP), Nkurunziza Claude