Dans les affaires judiciaires burundaises du moment les intrusions répétées de la France et de la Belgique sous couvert de l’Union Européenne -UE-, ne facilitent pas les choses … Il y a de cela quelques jours le représentant de l’UE européenne dans les Grands Lacs (un Belge) s’octroyait le luxe de remettre en cause le jugement donné dans des affaires judiciaires burundaises récentes, concernant des activistes terroristes. Ne maîtrisant nullement les intrigues nationales burundaises, il désavoua la justice burundaise en l’accusant de ne pas être indépendante. L’affaire Ernest Manirumva est un des autres exemples de dossiers judiciaires qui permettent de comprendre la difficulté qu’a le Burundi de montrer qu’il est un état indépendant en ce 50 ème anniversaire de son indépendance. Le porte parole de la Cour Suprême vient de donner des éclaircissements sur le dossier Manirumva …
M. Elie Ntungwanayo, porte parole de la Cour Suprême du Burundi, a animé, jeudi dernier, une conférence de presse. Il s’agissait d’apporter des éclaircissements sur le dossier de l’ancien vice président de l’OLUCOME Ernest Manirumva. Ce dernier a été assassiné en 2009 et son dossier demeure toujours pendant en justice…
Rappelons quelques étapes du dossier l’année dernière :
Janvier 2011:
19/01 – Audience à la chambre criminelle près la Cour d’Appel de Bujumbura, du procès d’assassinat d’Ernest Manirumva, ancien vice président de l’OLUCOME. Les débats se centrent sur des demandes de libertés provisoires pour les prévenus et l’incompétence de la Cour à juger certains prévenus.
L’un des détenus dans l’affaire,M.Gaspard Rusabagi, est accusé par le ministère public d’avoir effacé les traces de sang du crime contre Ernest Manirumva, charge que son avocat rejette catégoriquement arguant que l’assassinat de Manirunva a eu lieu à Bujumbura alors que son client travaillait à Rutana. Le ministère public a remis en délibéré ce procès et ainsi les demandes de libertés des prévenus n’ont pas pu être examinés.
20/01 – La partie civile dans le dossier Ernest MANIRUMVA dépose des documents à la Cour d’Appel. Elle dit souhaiter pour la prochaine audience, que le dossier soit traité au fond. La partie civile indique que le rapport de la 3ème commission d’enquête avait exigé l’audition d’un certain nombre de personnes dont quelques hauts gradés de la Police nationale, et aussi leur appliquer le test ADN, en vue de compléter les investigations de FBI.
Avril 2011:Le Réseau Diplomatico-Médiatico-Civils (RDMC) organise une semaine dédiée au 2ème anniversaire de l’assassinat d’Ernest MANIRUMVA. Il dénonça la lenteur de la procédure judiciaire dans cette affaire. La ministre de la justice, Ancilla NTAKABURIMVO, soutenant, de son côté que le procès suivait son cours normal… La ministre NTAKABURIMVO Ancilla indiqua que le procès était complexe ( sous entendu vue l’intrusion dans l’affaire de la France et de la Belgique) d’autant plus que certains suspects étaient difficiles à localiser.
Mai 2011: Retour de Canada de M. Gabriel NDUWAYO alias Sésé… Le RDMC soutient que M. Gabriel NDUWAYO est le principal accusé dans l’assassinat d’Ernest MANIRUMVA. Alors que d’autres soutiennent plutôt qu’il s’agit d’un reglement de compte interne au sein de l’Olucome.
Juillet 2011: Maître Isidore RUFYIKIRI,avocats de Monsieur Hilaire NDAYIZAMBA, un des accusés dans l’affaire MANIRUMVA demanda que les détenus puissent bénéficier d’une libération provisoire. Lors dans l’audience publique, le ministère public avait demandé qu’on lui remette le dossier parce qu’il y avait de nouveaux éléments.
Pour beaucoup d’observateurs Barundi, selon l’opinion publique burundaise, ce dossier Manirumva semble être surexploité par une partie de la presse et des associations de la société civile burundaise, proches de l’ancienne dictature des Bahima burundais (Micombero, Bagaza, Buyoya),aidé en cela par un réseau occidental franco-belge, se revendiquant parler au nom de l’Union Européenne . Il s’agit du fameux Réseau Diplomatico-Médiatico-Civils (RDMC). Cette presse et ces associations civiles du RDMC, ont déjà tranché. Pour ce dernier, Il n’y a aucun doute sur l’accusé. C’est le Régime en place (Service secrêt, Police, Président etc.). Tandis que,pour les autres, il faut laisser la Justice dire sa vérité. Il faut aussi accepter de voir ailleurs et plus particulièrement dans l’entourage de feu Ernest Manirumva au sein d’Olucome. Une bataille a donc lieu en ce moment entre ce Réseau Diplomatico-Médiatico-Civils (RDMC) et la Justice de l’Etat du Burundi.
Le dossier Manirumva est celui d’un activiste d’une ONG anti-corruption -Olucome-. Il est mort assassiné suite à une intrigue typiquement burundaise. Deux pistes: – Soit il a été tué par des membres proches de l’ONG pour des raisons d’argent ou de leadership (car jugé trop proche du pouvoir contrairement au Président de l’ONG); – Soit il a été tué par des gens qu’il allait accusé de corrompus. Le dossier judiciaire se poursuit. Il y a quelques jours, voici ce que qu’en disait l’Ambassadrice des USA au Burundi, Mme Pamela Slutz, interviewée par des journalistes d’ -iwacu-burundi.org- : “Je voudrais m’exprimer et corriger certaines allégations telles qu’entendues dans les média et impliquant certains responsables du SNR … Le FBI a été invité par le président Pierre Nkurunziza en 2009 pour participer dans l’enquête sur ce meurtre. Le FBI a envoyé plusieurs agents au Burundi d’avril 2009 à avril 2010. Ils ont conduit des enquêtes conjointement avec la police burundaise et ont étroitement collaboré avec le procureur chargé de cette affaire. Il y avait trois commissions spéciales en 2010. Les agents du FBI ont demandé au parquet de se saisir du dossier. Le FBI a aussi reçu la déposition d’un autre témoin en 2011. Le Procureur Général de la République a requis du Gouvernement Américain qu’il facilite une interview (face à face) de M. Havyarimana, témoin du FBI, par les magistrats burundais. Le gouvernement américain est prêt, en principe, pour faciliter cette interview. Je l’ai signifié au Procureur Général de la République au mois de décembre 2011 et je lui ai demandé de faire cette requête dans une forme « commission rogatoire » adressée au Département Américain de Justice. Nous attendons qu’il le fasse pour avancer dans ce dossier.”
Pour comprendre ces intrigues burundais, il est impératif de ne pas occulter cette vérité autour de la dictature des Bahima burundais (Micombero, Bagaza, Buyoya)… Cette dernière, en 40 ans, a fait près de 4.5 millions de victimes Bahutu Barundi (comprenant les Batutsi et les Baganwa ). Les victimes de la Dictature sont abasourdis lorsqu’on leur explique aujourd’hui que c’est d’abord l’Affaire Manirumva qui compte. Car ils n’ont reçu jusqu’à présent ni justice ni réparation. Les Barundi ne comprennent pas comment certains politiciens et diplomates occidentaux (Français et Belges ) s’accordent à rentrer dans le jeu qu’impose les -enfants de la Dictature- afin d’occulter le vrai dossier judiciaire burundais qu’est celui du – Génocide des Bahutu Barundi – (1).
Pour preuve, fin janvier et début février de cette année, la Commission Nationale Vérité Réconciliation – Cnvr- devait être mise sur pied. Mais avec la pression des enfants de la Dictature, appuyée par la France et les libéraux francophones de Belgique, des accusations mensongères sur une soit disant justice non indépendante à commencer à se répandre dans les média internationaux… Ces derniers exigeant que les Barundi acceptent des occidentaux dans la Cnvr burundaise … (En 1972, la France a aidé le régime dictatorial de Micombero a tué des centaines de milliers de Barundi notamment en pilonnant avec leurs avions des camps de réfugiés barundi en Tanzanie. A ce moment la Belgique, elle, avait dénoncé le Génocide en cours contre les Bahutu Barundi. Mais, comme pour le Rwanda en 1994, elle avait fui ses responsabilités à défendre les victimes de ce Génocide. Elle préfera se retirer au plus vite …).
Cette intrusion extérieure, surtout des Français et des Belges, par l’intermédiaire de l’Union Européenne UE, ne plait pas d’une manière générale aux Barundi. Il ne faut pas oublier que les Bahutu Barundi ( comprenant les Batutsi et les Baganwa ),actuellement au pouvoir, ont payé de leur sang pour se libérer du joug des Bahima Burundais, ami de la France et des libéraux Belges. De 1993 à 2003, le Burundi a connu une guerre civile contre la Dictature féroce du Major Buyoya. Depuis leur victoire, les Bahutu Barundi(Batutsi, Baganwa compris) sont au commande du pays. Ces derniers ont rétabli la Démocratie. Depuis 2005 à aujourd’hui le Burundi a organisé deux scrutins électorales démocratiques (en 2005 et 2010) avec succès.
Revenons à l’Affaire MANIRUMVA … Le porte parole de la Cour Suprême du Burundi,M. Elie Ntungwanayo, a indiqué à la presse que les investigations suivaient leur cour normal, concernant le dossier MANIRUMVA . Il a indiqué, ( pour que cela soit entendue par le RDMC, cité plus haut), qu’à chaque étape judiciaire concernant ce dossier, les médias ne devaient pas en être informés. D’où il a conseillé, (à ce réseau et) au média surtout, de travailler dans les limites que la loi leur reconnaissait. Il conçoit néanmoins que les organes de presse ont le droit de chercher des informations sur n’importe quel sujet d’intérêt public, mais que la phase des investigations judiciaires est délicate en ce moment. Toutefois, il a promis que le dossier sur l’affaire Manirumva sera bientôt re-fixée.
(1) Le génocide du Burundi, https://www.burundi-agnews.org/genocide.htm
DAM, NY, AGnews, le 12 mars 2012.